lundi 19 octobre 2009

Break

Le blog est actuellement suspendu, son auteur ne résidant plus à Paris et se retrouvant pour l'heure condamné à une accalmie culturelle.
Je ne manquerai pas de le reprendre le moment venu, en attendant je ne peux que vous recommander d'aller écouter Nathalie Dessay chanter Bellini à Bastille cet automne.

vendredi 19 juin 2009

Demofoonte de Niccolo Jommelli - Cesare Lievi/Riccardo Muti

Demofoonte de Niccolo Jommelli à l'opera Garnier dirigé par Riccardo Muti et mis en scène par Cesare Lievi, représentation du 18 juin 2009.

L'opéra napolitain du XVIIIe siècle n'est pas très connu, je ne connaissais pas même ce compositeur, c'est un des objectifs de Riccardo Muti et son orchestre de le faire connaître. Cet opéra date de 1743, le roi de Thrace, Démofoonte (Dimitri Korchak) a deux fils, Timante (José Maria Lo Monaco), héritier du trône et époux secret de Dircéa (Maria Grazia Schiavo), et Cherinto (Valentina Coladonato) qui est amoureux de Creusa (Eleonora Buratto), la fille du roi de Phrygie, promise à Timante sur décision de leurs pères respectifs. Dircéa est fille de Matusio (Antonio Giovannini), un vassal (d'où les noces secrètes), et mère du petit Olinto avec Timante (la situation de départ est déjà complexe, vous l'aurez compris).Chaque année une vierge, tirée au sort, doit être sacrifiée aux dieux mais le roi a exclu la famille royale du tirage au sort et Matuso s'en plaint par souci pour sa fille (qu'il croit vierge), Demofoonte désigne Dircéa sans tirage au sort en guise de punition pour cette insubordination. Timante s'y oppose et le roi accepte de fléchir à condition que Timante épouse Creusa, ce qu'il ne peut accepter étant déjà marié, il décide donc de délivrer Dircéa par les armes et de s'enfuir avec elle. Après une bataille l'amour filial de Timante le fait céder devant son père mais il avoue enfin son mariage et son fils caché, le sacrifice n'aura pas lieu mais tous deux sont incarcérés.Pendant ce temps Creusa implore Démofoonte et obtient sa pitié, à peine Timante apprend t-il sa réhabilitation que Matusio vient l'informer d'une découverte qu'il a faite : Dircéa est fille de Démofoonte et non de Matuso. Timante comprend avec horreur la relation incestueuse dont il est coupable mais après maintes lamentations, tous apprennent aussi que Timante est le fils de Matuso et non de Demofoonte. Tout s'arrange donc, le véritable héritier Chérinto épousera Creusa, celle qu'il aime, Timante reste avec son épouse mais conserve l'amour paternel de Démofoonte.

L'intrigue est finalement très classique, le coup des enfants échangés à la naissance est assez amusant, d'autant plus que cette oeuvre est peu connue. Bien que très sérieux, le dernier acte de cet opéra apporte quelques touches d'humour à cause de ces "coups de théatre" aussi abrupts qu'opportuns et se termine bien.
Autre particularité, fortement liée à l'époque et l'origine de cet opéra, les voix. Sur les 7 chanteurs il y a 3 hommes dont 2 contre-ténors et un seul ténor! La voix la plus grave est donc celle de l'excellent ténor Dimitri Korchak (Demofoonte) qui donne toute son ampleur et sa majesté à ce rôle.

Dans ce contexte très baroque, taillé pour laisser parler la virtuosité vocale et notamment celle de quelque castrat, la part belle est faite aux longs solos, épuisants pour les chanteurs et même un peu pour le public. José Maria Lo Monaco a vraiment eu une tâche ardue, elle m'a même paru arriver à bout de souffle à la fin d'un solo particulièrement long et difficile. Si l'alternance des récitatifs et des arias s'enchaîne bien, certains arias sont quand même un peu longuets, les chanteurs ont beau bouger il est difficile d'avoir un jeu de scène et de captiver un public sur la même phrase pendant 10 minutes.
La tâche est moins lourde pour la fraîche voix d'Eleonora Buratto (Creusa) qui arrive tout à fait à convaincre, de même que les voix bien rondes de Valentina Coladonato (Cherinto) et Maria Grazia Schiavo (Dircéa), sans oublier la très belle performance de Korchak comme je l'ai déjà évoqué.
C'est moins le cas pour les deux contre-ténors : Antonio Giovannini manque clairement de puissance, on l'entend peut et il n'impressionne pas, que ce soit en solo ou lorsqu'il chante avec d'autres voix. Idem pou Valer Bama-Sabadus, bien que son rôle soit très court.

Je ne peux continuer sans parler de l'excellente prestation de l'orchestre et de la direction splendide de Riccardo Muti, incontestable maître de la baguette qui a été à la Scala pendant 20 ans et nous fait l'honneur d'un premier passage à Garnier. L'expérience et le talent parlent : tout est impeccable, pas un seul faux pas, la partition est sous contrôle...Ecoutez-donc, voici de la musique. C'est un peu mon regret de n'avoir pas toujours prêté attention à l'orchestre, mais c'est aussi à cela qu'on reconnaît la qualité musicale d'un opéra : lorsque l'harmonie est telle qu'on n'écoute pas deux ensemble, lyrique d'un coté, instrumental de l'autre, mais bien un seul et unique ensemble musical.
A noter une particularité musicale, il m'a semblé identifier une propension de Jommelli à terminer ses morceaux en levée. La note finale est souvent inattendue car elle monte et reste en suspens là où on s'attendrait à ce qu'elle baisse, ce qui me parait peu commun pour l'époque. Il en est de même pour le final de l'oeuvre où tous les chanteurs se retrouvent pour terminer ensemble, on s'attendrait à quelque chose de bien plus long et virtuose suite à tous les aria qui ont précédé et en réalité le final est rapide, presque abrupt (et la vitesse à laquelle le rideau est tombé contribue tout à fait à ce sentiment).

J'ai aussi été conquis par la qualité des décors et des accessoires, rien de grandiloquant ni d'une ambition titanesque mais cohérent avec l'oeuvre (c'est déjà beaucoup) et soigné, c'est du bon travail, c'est beau, ça sert l'oeuvre, que demander de plus? Les costumes sont moins dans cette veine, ils sont parfois bien mais ne détonnent pas et ne servent pas particulièrement l'oeuvre (le roi en haillons, très peu pour moi). Je trouve cela un peu dommage vu l'apropos de costumes plus fournis dans ce type d'oeuvre.

Il est évident que la présence de Riccardo Muti a fortement collaboré au remplissage de la salle tout au long des représentations mais il ne faut pas venir que pour lui. Il est sublime mais les chanteurs aussi et l'oeuvre est tout à fait intéressante (malgré quelques longueurs il faut l'admettre).
Voilà la preuve qu'on peut découvrir de nouvelles et belles choses dans l'opéra sans tomber dans l'avant-garde.

Un grand merci à Riccardo Muti à Cesare Lievi pour nous avoir fait découvrir Jommelli et son opéra d'une si belle façon.

La Tosca de Puccini - Werner Schroeter/Stefan Solyom

La Tosca de Giacomo Puccini à l'opera Bastille dirigé par Stefan Solyom et mis en scène par Werner Schroeter, représentation du 2 juin 2009.

C'est un grand opéra, joué depuis longtemps par les plus grands, et joué ici avec brio.

Pour resituer rapidement le contexte, nous sommes à Rome au moment ou Napoléon marche sur Marengo, Mario Cavaradossi (Aleksandrs Antonenko), peintre et républicain, est amant de Floria Tosca (Adina Nitescu), archétype de la femme jalouse au caractère bien trempé. Cesare Angelotti (Wojtek Smilek), républicain engagé incarcéré pour son titre politique vient de s'échapper du chateau saint Ange et vient se réfugier chez Cavaradossi pour échapper à l'infâme Scarpia (James Morris), chef de la police cruel et débauché qui cache son iniquité sous sa fonction et son titre de baron. Mais Scarpia retrouve la trace d'Angelotti et arrête Cavaradossi.
Ne réussissant pas à le faire parler, il fait pression sur Tosca qui finit par parler pour sauver son amant et obtient un sauf conduit pour partir avec lui en échange d'un moment "d'intimité" avec Scarpia. Mais la Tosca n'est pas femme facile et la seule étreinte que Scarpia obtient est celle de la mort. Malheureusement Scarpia avait menti et ce qui devait être un simulacre d'exécution était une exécution bien réelle et Cavaradossi meurt fusillé, la Tosca désespérée se jette dans le vide.

Cet opéra est d'une grande intensité tragique qui arrive à son paroxysme, comme toujours, à la fin. Cette intensité est servie par une formidable interprétation à la fois de l'orchestre, qui a réalisé une très belle performance, et des chanteurs qui ont réellement été sublimes. Ma préférence va au duo Nitescu/Morris (Scarpia et Tosca), les plus belles voix de cette représentation à mon goût qui réussissent leurs duos à merveille et jouent aussi bien qu'ils chantent.

Lors d'une telle représentation, on peut imaginer la pression des grandes représentations données dans le passé qui s'exerce sur les chanteurs, la barre est haute et certains dans la salle ont entendu Pavarotti ou Callas chanter cet opéra (ce n'est pas mon cas). J'ai été cependant frappé par l'influence de ces grands de l'opéra aujourd'hui, notamment par Adina Nitescu dont on perçoit l'inspiration Maria Callas, que ce soit dans la voix ou l'attitude on voit qu'elle a travaillé en s'inspirant de la Callas et le résultat est sublime.

Les seuls bémols que je note sur cette réprésentation sont pour les décors de fond qui sont peu harmonieux avec tout le reste, pas même avec les accessoires (très réussis quant à eux, tout comme les costumes), et cela va de mal en pis au fur et à mesure qu'on approche de la fin, dommage. Au niveau de la mise en scène tout n'est pas très clair, lors du dernier acte on voit pendant l'ouverture un pâtre (ou un fauconnier) dont le rôle m'échappe encore, de même pour le soldat qu'on retrouve mort au réveil, il n'est pas normal que certaines scènes restent incomprises. Un autre défaut est la procession de la fin du premier acte, bien que les costumes et accessoires soient tout à fait crédibles, il est regrettable que l'ordre et la tenue de la procession ne le soient pas, il y a un dais mais l'ostensoir n'est pas dessous et tous les participants sont tendus vers... vers quoi au juste? vers le dais? vers l'évêque? Le metteur en scène aurait pu faire l'effort d'un conseiller religieux ou simplement d'une recherche rapide pour savoir que le coeur d'une procession eucharistique c'est l'eucharistie.

C'est d'une importance secondaire mais cela empêche cette représentation d'atteindre les sommets car le reste y était, je la recommande donc vivement, un bel opéra servi par une excellente prestation des chanteurs et de l'orchestre.

Merci pour cette soirée!

Un bal masqué de Verdi - Gilbert Deflo/Renato Palumbo

Un bal masque de Verdi, dirigé par Renato Palumbo et mis en scène par Gilbert Deflo, donné à l'Opéra Bastille le 6 mai 2009.
Voilà du Verdi, et du beau Verdi, servi par un orchestre assez talentueux et une mise en scène globalement réussie. J'ai cependant le regret de n'avoir pas pu entendre Ramon Vargas, celui-ci ayant étant souffrant les 2 représentations pour lesquelles j'ai tenté ma chance. Evan Bowers, bien que talentueux, était un peu décevant et manquait de carrure pour ce rôle central. J'ai également raté Deborah Voigt mais Angela Brown tenait bien le rôle avec une voix puissante
qui emplissait la salle, contrairement à celle d'Evan Bowers.
Ayant beaucoup de retard sur cette critique, je ne peux m'étaler sur la qualité de chaque chanteur et de l'orchestre faute de mémoire mais je garde un bon souvenir musical en général.
Les décors sont bien mais un peu vides, pas très ambitieux à mon goût, les costumes en revanche sont plutôt réussis, ils gardent une certaine temporalité et parviennent à mettre en valeur les personnages.
Evidemment on ne peut parler de cet opéra sans la scène du bal, très attendue car scène finale, qui est vraiment formidable sur tous les plans. L'opéra vaut le coup pour cette seule scène : partition, livret, décors, costumes, danseurs, chorégraphie, tout est magique et formidable dans cette scène. Même l'histoire, malheureuse comme souvent, est magnifique car pleine d'espérance avec le pardon qui est donné par la victime innocente.

Un très bon opéra qui vaut le coup, ne serait-ce que pour le dernier acte.

mercredi 25 mars 2009

Idomeneo de W.A Mozart - Luc Bondy / Thomas Hengelbrock

Idomeneo de Wolfgang Amadeus Mozart, mise en scène de Luc Bondy, dirigé par Thomas Hengelbrock, représentation du 14 mars 2009 à l'Opéra Garnier.

C'est désormais dans le répertoire seria de Mozart que l'opéra Garnier nous propose de s'aventurer. Le roi de Crète, Idoménée, qui vient de vaincre les Troyens, fait naufrage et afin de sauver sa vie, promet à Neptune de sacrifier la première personne qu'il croisera sur le rivage. Comble de malheur, cette personne sera Idamante, son propre fils, qu'il va tâcher de fuir, malgré l'incompréhension filiale de celui-ci. Idamante est par ailleurs amoureux d'Ilia, la fille de Priam, a qui il rend la liberté, ainsi qu'à ses compatritotes. Elle éprouve les mêmes sentiments envers Idamante mais se refuse à les accepter par respect envers ses pères tandis qu'Electre, membre de la noblesse crétoise, soupire sans succès après Idamante.
Idoménée, ne voulant pas sacrifier son fils, attire sur son peuple le courroux de Neptune qui dévaste la ville. Fidèle à son devoir, Idoménée s'apprête à sacrifier son fils lorsque Neptune intervient et accepte de commuer sa peine à l'abandon de son trône, ce qu'Idoménée accomplit volontiers en faveur de son fils, lequel peut épouser Ilia, tout le monde est heureux sauf Electre qui sort de scène pour se donner la mort.

C'est un bel opéra que Mozart a écrit là, un opéra dans lequel on reconnait sans difficulté sa touche particulièren mais aussi une originalité qu'on retrouve peu dans d'autres opéras, car ultérieurs à celui-ci. Il s'agit de la place donnée aux chanteurs, particulièrement prépondérante, et qui s'exprime par une certaine complexité de la partition et certains effets. C'est l'époque des castrats et de la virtuosité vocale, période qui se termine alors mais dont l'esprit emplit encore cet opéra. Certains passages ont été écrits pour des chanteurs de l'époque et il devient difficile de retrouver une interprétation semblable, le rôle d'Idamante était à l'origine destiné à un castrat, il est ici interprété à merveille par la soprane Joyce DiDonato. La prestation des chanteurs a été formidable, du Neptune tonitruant, à la vibrante Ilia en passant par le beau timbre d'Idoménée (Paul Groves), tous sont très bons et prêtent avec brio leurs voix aux difficiles partitions écrites par Mozart. Ma préférence va clairement à Idamante, totalement renversante, et à Electre (Mireille Delunsch), tout à fait poignante et sublime.

L'orchestre est un peu en retrait, ce qui semble normal vu l'esprit dans lequel a été écrit cet opéra, il est même un peu en décalage parfois, ce qui moins normal et quelque peu regrettable.
La mise en scène est très dynamique, très vivante, il y a beaucoup de figurants et ils occupent en général bien toute la scène. Elle est aussi assez sombre, sûrement pour rappeler la dimension tragique qui pourrait être entachée par le choix d'une soprane pour interpréter Idamante et par la fin heureuse de cet opéra, ce qui n'est pas commun dans la tradition du tragique.

Au dynamisme de cette mise en scène, fort appréciable s'il en est, j'opposerai cependant le manque d'originalité des costumes, plutôt atemporels et sans grand intérêt (une écharpe comme seul insigne royal, le port d'un manteau comme seul marque de commandement...). Je trouve par ailleurs que ce dynamisme des figurants se paye cher par le bruit bien trop gênant de leurs pas sur les planches de la scène lorsqu'il y a de grands mouvements. C'est un manque de légèreté qui contraste amèrement avec la musique de Mozart. Le jeu de scène des chanteurs est quant à lui assez beau, bien que sans grande originalité, mais aussi assez statique (souvent immobile face au public). Je pense cependant que c'est ainsi que Mozart voyait cet opéra, cette époque qui acclamait la virtuosité vocale des castrats et de quelques chanteurs vedettes voulait les entendre mais aussi les voir, le rôle de la scène et de l'orchestre étant vraiment relégués au second voire troisième rang, d'où cette manière de chanter immobile face au public.

Cet opéra est finalement très lié au contexte de son écriture et c'est dans cet esprit qu'il faut aller, non pas le voir donc, mais plutôt l'entendre, la représentation ici proposée me parait en effet assez fidèle à cet esprit (aussi est il peut être difficile de faire autrement). On vient donc écouter des chanteurs. Donner une appréciation globale de cet opéra n'est possible qu'à partir du moment où l'on accepte de placer la virtuosité vocale en critère d'appréciation prioritaire, passé ce cap je peux donc dire que cette réprésentation était sublime tant les chanteurs ont été éblouissants de talent.

vendredi 20 mars 2009

Werther de Massenet - Jurgen Rose / Kent Nagano

Werther de Jules Massenet est mis en scène par Jurgen Rose et dirigé par Kent Nagano, la représentation est celle du 6 mars 2009 à l'opéra Bastille.

Werther est un drame tiré de Goethe, la scène se passe à Francfort, c'est l'histoire d'une jeune femme, Charlotte (Susan Graham), qui a promis à sa mère mourante d'épouser Albert (Ludovic Tézier), un homme ayant une bonne situation mais dont elle n'est pas amoureuse. Elle est au contraire tombée passionnément amoureuse de Werther, joué ici par le baryton Rolando Villazon (ce qui est rare dans cet opéra), passion qui est réciproque mais qu'elle se refuse à avouer à cause de son serment.
Susan accomplit son devoir et épouse Albert, Werther ne tient plus et veut partir, elle lui dit de revenir à Noel mais lui dit qu'il ne reviendra pas. Il revient malgré tout à Noel, Susan avoue enfin ses sentiments mais ne peut tromper son mari. Werther se donne la mort mais se sait pardonné lorsqu'il entend les chants de Noël.

Cet opéra, bien que dramatique et très marqué par le protestantisme (le "devoir" de Susan revient comme un leitmotiv, reste porteur d'espérance avec ce thème de Noel toujours en demi-teinte, ce qui le rend d'autant plus beau.
Cette représentation fut très impressionnante tant sur le plan musical que scénique, Rolando Villazon prête à merveille sa belle voix de baryton, une gravité qui rend parfaitement la dimension tragique insufflée par Goethe, de même que Susan Graham qui est poignante de justesse dans la douleur et le déchirement qu'elle exprime. Je mettrai un bémol pour l'un des interprètes secondaires (Christian Jean) et pour l'harmonie chanteurs/orchestre, il y a des moments où un léger décalage entre ceux-ci s'est fait entendre. C'est là le seul bémol que je mettrai car tout le reste était excellent.

La mise en scène en fait partie, de très bonnes idées, beaucoup de vie dans le jeu de scène et de justesse dans l'ambiance ainsi rendue. La joie et l'harmonie du début tranche clairement avec la dureté de l'éloignement à la fois physique et affectif entre Werther et Charlotte, avant et même après les retrouvailles de Noel.
La scène est composée d'un rocher central sur lequel est disposé le bureau de Werther (un bureau de poète, hommage à l'auteur) autour duquel le décor tourne, ce rocher illustre le départ et l'isolement de Werther. L'utilisation de ce décor est plutôt géniale : à l'ouverture de chaque acte, un rideau fin sur lequel des extraits de l'opéra sont comme griffonés est baissé et l'on peut voir par transparence Werther posant sur son rocher illuminé et le décor et ses accessoires tournant autour dans la pénombre. En bref, le rendu est très visuel, très esthétique et frappant de profondeur.
Le jeu de scène est lui aussi imprégné de ce dynamisme circulaire et occupe bien l'espace, cette dimension circulaire imprègne en fait toute la représentation et rajoute au tragique de la scène qui se déroule sous nos yeux.

Pour conclure, car il faut bien finir, je dirai simplement que c'est beau, très beau, très prenant et vraiment réussi. Il est par ailleurs agréable d'entendre un opéra en français, ce qui est rare cette année. Profitez-en, c'est à ne pas manquer.

jeudi 19 mars 2009

Le nozze di Figaro de W.A Mozart - J-L Martinoty / M. Minkowski

Le nozze di Figaro de W.A Mozart, mis en scène par Jean-Louis Martinoty et dirigé par Marc Minkowski, donné au Théatre des Champs Elysées, représentation du 3 mars 2009.

Je ne m'attarderai pas sur le fond de l'histoire que l'on peut trouver dans la pièce de théatre "le mariage de figaro" que j'ai déjà commenté précédemment.
Une belle performance tant des chanteurs que des musiciens, une très bonne partition musicale, rien d'étonnant puisque les musiciens du Louvre sont dirigés sous la baguette magique de Marc Minkowski avec légèreté et précision, rien non plus à reprocher aux chanteurs, qualité, puissance, justesse du ton, tout était là.
La mise en scène assez classique, d'époque, est plutôt bonne, sans grande originalité cependant, on peut même trouver qu'elle manque de relief et ne met pas tellement en valeur l'opéra mais en fait elle ne le gène pas non plus. Si cette mise en scène reste de qualité, je trouve en effet qu'elle reste un peu sclérosée parfois, certaines scènes manquent de mouvement et l'espace n'y est pas assez occupé et approprié par les acteurs, le jeu de scène est bon mais pas toujours assez dynamique. Elle comporte cependant de bonnes idées et des décors et accessoires de qualité, j'ai notamment bien aimé le jeu de transparence et de lumière pour illustrer le jeu des déguisements lors de la scène dans les bois du dernier acte.
Mais comme je l'ai écrit, ça ne gène pas l'ensemble, c'est très beau, très bien joué et chanté, les petites insuffisances de certains épisodes de cette mise en scène empêchent juste la représentation d'atteindre l'excellence et de faire exception, donc au delà d'une perfection qui est déjà atteinte ici, il faut le reconnaître.
Les chanteurs sont excellents et le livret également, cet opéra de Mozart est un classique de l'opéra-bouffe, drôle, beau et divertissant. C'est dans cet opéra que l'on peut entendre un des grands airs de l'opéra, et un de mes préféré (et clairement mon duo préféré), Canzonetta sull'aria, lorsque la Comtesse et sa servante écrivent la lettre pour le Comte, qui est magnifiquement interprété ici.
C'est donc un magnifique opéra que je vous conseille, très bien interprété, il manque ce petit quelque chose d'originalité pour pouvoir être qualifié d'exceptionnel, mais on peut difficilement être déçu.