mercredi 3 décembre 2008

La mégère apprivoisée de W. Shakespeare - Okaras Korsunovas

La Comédie-Française nous propose depuis quelques temps La Mégère apprivoisée de William Shakespeare, mise en scène par le lituanien Okaras Korsunovas. Séance du 2 décembre 2008 au soir.

Cette comédie peu connue désigne, par le titre de mégère, Catarina, l'acariatre fille ainée d'un riche marchand de Padoue qui essaie tant bien que mal de marier son ainée tandis que sa cadette est courtisée de toutes parts. Bianca, la cadette, ne peut être mariée avant Catarina, c'est pourquoi ses prétendants se liguent pour trouver un homme assez cupide, Petruccio, pour épouser Catarina, bon gré mal gré. Petruccio va réussir, à force de cruelles privations, à apprivoiser sa femme, jusqu'à la soumission complète. Shakespeare joue dans cette pièce, une de ses premières comédies, sur les cordes de la relation maitres et valets et sur la guerre des sexes mais détonne quelque peu du genre par la personnalité de ses protagonistes.

La mise en scène d'Okaras Korsunovas a rencontré un certain succès auprès des critiques. Je ne serai pas de ceux là.
Il faut reconnaître que le rythme endiablé de la pièce est dynamisant tout au long de ce spectacle de 3 heures, les acteurs sont talentueux et rentrent bien dans le jeu, c'est indéniable. Cette mise en scène très dansante, une véritable chorégraphie, est réellement servie par des acteurs dynamiques et enjoués, tellement que ç'en devient...puéril.

Puérile. C'est ainsi que je qualifierai cette mise en scène. Des effets musicaux faciles sur des gags souvent grotesques, on a parfois l'impression de regarder un guignol ou un dessin animé, l'effet comique voulu par la mise en scène manque de subtilité et s'avère parfois assez lourd tandis que les personnages (Catarina et Petruccio) sont au contraire assez subtils par leur jeu de scène. C'est le contraire qui aurait été préférable, les personnages shakespeariens sont lourd: Catarina devrait être plus agressive et Petruccio plus rustre, de là aurait dû naître l'effet comique car c'est de Shakespeare qu'il serait venu. Ici il semble plutôt que le metteur en scène a voulu éluder le comique de Shakespeare et recréer lui-même le comique de la pièce par des effets pour le moins grotesques.

Je ne m'attarderai pas sur les costumes qui sont en fait symbolisés sur des panneaux de bois, habit d'un coté, miroir de l'autre, tenus par les acteurs, eux mêmes vêtus de noir. Je ne suis pas très friand des mises en scène trop modernes et décalées. Les costumes sont à mon goût une partie importante de la scène et cette pratique originale (peut être trop), bien que contribuant à des effets de scène intéressants (changements de costume, reflets de miroir, chorégraphies...), a quelque peu dégradé mon immersion et ma sympathie pour la mise en scène.

Le manque de brutalité que je relève chez les personnages principaux ici interprétés vient à mon avis du fait que Okaras Korsunovas a voulu en faire des amoureux. C'est un choix que certains font afin d'atténuer le propos de la pièce jugé par trop misogyne ("soyez soumises à votre mari, il est votre seigneur, etc....") : la mégère ne joue les dominées et l'époux ne joue les dominants que par amour l'un pour l'autre. Au risque de choquer certains bien-pensants, je préfère la version machiste du premier degré, je trouve cela bien plus amusant, ne serait-ce que par anachronisme entre la bienséance de l'époque shakespearienne et celle d'aujourd'hui.
Et puis mince, ce n'est que du théatre!

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